présentation
Lost in Stockholm cherche une voie de conciliation entre l’absurde, le surréalisme et le burlesque.
Si vous faites appel au travel planner suédois Sverige Creative Travel, c’est que quelque chose ne tourne pas rond dans votre vie, c’est que vous ignorez ce qui vous attend, c’est que vous êtes prêt à mourir pour la Suède, alors que vous n’êtes pas du tout suédois. Si vous êtes prêt à mourir pour la Suède, c’est qu’il y a un petit problème dans l’organisation et le déroulement de vos vacances reconstructives. Ce n’est pas vraiment la thalasso qu’on imaginait. Non. J’ai l’impression que vous jouez avec des forces plus grandes que vous. Et à l’instant d’entrer dans le Skogskyrkogården, vous feriez mieux de réfléchir : les moustiques ne sont pas des moustiques. Je répète : les moustiques ne sont pas des moustiques.
Frayant avec l’absurde, le surréalisme et le burlesque, Lost in Stockholm est une comédie noire et un hommage à l’imagination, un appel à l’émerveillement et une mise en doute de la vie moderne. Lost in Stockholm cherche le point commun entre les films d’Aki Kaurismäki, la furie du Capitaine Haddock et les chutes de Buster Keaton.
La pièce est le fruit d’une rencontre entre l’écrivain Fabrice Melquiot et un groupe d’apprentis-comédiens de l’ESCA. La comédienne Anne Le Guernec complète la distribution du spectacle. Paul Desveaux en a signé la mise en scène.
extrait
Hugo al-Charif
Pour toi, l’oubli est une figure de style ?
Fouad al-Charif
C’est une opération du langage qui vise à reconnaître ce qu’est le monde pour le transformer. On se dit des trucs, tu vois, ça a l’air simple. Eh ben non. Pourquoi ? Parce que tout ce qu’on se dit est une métaphore de ce qu’on se dit.
Hugo al-Charif
L’oubli, c’est l’oubli, c’est tout. Et sans oubli, on mourrait étouffé par des images.
Fouad al-Charif
Quand tu dis : c’est l’oubli, Hugo, c’est, je crois que tu touches à quelque chose d’important.
Hugo al-Charif
Le seul truc que je touche, c’est le manche de cette pioche et la terre où je frappe.
Fouad al-Charif
Quand on dit : c’est l’oubli, on dit aussi ce n’est pas l’oubli et c’est comme l’oubli.
Hugo al-Charif
C’est, ce n’est pas, c’est comme ?
Fouad al-Charif
C’est ça.
Hugo al-Charif
Donc, ce n’est pas ça et c’est comme ça ?
Fouad al-Charif
Quand on dit : c’est la vie, on dit aussi ce n’est pas la vie et c’est comme la vie. Non ?
Hugo al-Charif
Euh.
Fouad al-Charif
Tu sens ?
Hugo al-Charif
C’est la vie.
Fouad al-Charif
Tu sens comme tu dis ce n’est pas la vie quand tu dis c’est la vie ?
Hugo al-Charif
Et c’est comme la vie ?
Fouad al-Charif
Tu sens.
Hugo al-Charif
Ouais. C’est vrai.
Fouad al-Charif
Donc, ce n’est pas vrai et c’est comme vrai.
Hugo al-Charif
Oh putain, je vais plus rien oser dire, de peur de ne pas dire ou de faire comme dire sans dire tout en disant.
Fouad al-Charif
L’oubli, ce n’est pas l’oubli et c’est comme l’oubli. Dans ma tête, des choses restent, elles sont ancrées, précises, limpides, d’autres disparaissent, elles sombrent dans va savoir quel trou. Ce sont toujours des images.
Hugo al-Charif
Mais toi, tu es bien là. C’est toi.
Fouad al-Charif
C’est moi et ce n’est pas moi et c’est comme moi.
Hugo al-Charif
À quel point c’est vrai, ça.
Fouad al-Charif
De fois, j’oublie de quoi on souffre.
Hugo al-Charif
Ça m’arrive. Je cherche et je ne sais plus rien de notre condition. Comme si j’étais un promeneur.
Fouad al-Charif
C’est ce qu’on est. On marche, on marche, on marche et on piétine. Heureusement qu’on oublie à quel point on piétine.
Hugo al-Charif
Il faut distinguer l’amnésie fonctionnelle ou dissociative de l’amnésie organique. L’amnésie fonctionnelle ou dissociative est déclenchée par un stress intense, des actes de maltraitance affective, un traumatisme.
Fouad al-Charif
Tu dis qu’on a été traumatisés ?